Histoire de la machine à tatouer moderne. 1/3

Histoire de la machine à tatouer moderne. 1/3

Les grandes évolutions de la machine à tatouer moderne se déroulent principalement aux Etats-Unis et en Angleterre durant la seconde Révolution Industrielle notamment grâce l’avènement des moteurs électriques et de l’électricité à partir des années 1880.
C’est une histoire fascinante que celle de cet étrange objet qu’est finalement le dermographe : chimère d’un stylo électrique, d’un fouloir dentaire et d’une sonnette de porte…

Le tatouage avant 1880

Avant les premières machines à tatouer électriques les tatouages ​​étaient réalisés grâce à diverses techniques manuelles dont beaucoup étaient inspirées des pratiques ‘indigènes’ que les marins ramenaient de leurs longues missions en terres lointaines.
Les tatoueurs alors itinérants, travaillent sur un coin de table et travaillent à la main : point après point (la technique du handpoke), perforant la peau peut-être deux à trois fois par seconde.
La technique est longue, laborieuse et ne permet pas une grande précision.

Stylo Électrique d'Edison à l'origine de la première machine à tatouer moderne.
Premier brevet du stylo d’impression autographique d’Edison.


Thomas Edison et le stylo d’impression autographique.

Edison est souvent considéré comme le père de la machine à tatouer électrique moderne. Même s’il s’avère qu’il y contribua grandement, vous allez voir que l’histoire du dermographe est bien plus complexe que cela…


Petits rappels sur Monsieur Thomas Edison

Edison, Edison… ça vous dit quelque chose mais vous vous avez du mal à vous rappeler du bonhomme ? Si c’est le cas je vous invite à relire sa bio qui est assez fascinante. Un sacré personnage ce Edison.
Sinon voici juste un petit résumé pour votre culture G

Thomas Alva Edison, (1847-1931) est un célèbre inventeur, scientifique et industriel américain.

Sourd et autodidacte, il fut le Fondateur de la General Electric, l’une des premières puissances industrielles mondiales. Inventeur prolifique, il déposa plus de 1000 brevets. Pionnier de l’électricité, diffuseur, vulgarisateur, il fut également l’un des principaux inventeurs du cinéma et de l’enregistrement du son (dont le phonographe et l’ampoule électrique entre autres).

Thomas Alva Edison père de la machine à tatouer moderne
Thomas Alva Edison

Et sinon, c’est quoi un stylo d’impression autographique ?

Le stylo d’impression autographique est un stylo électrique utilisant une fonction perforante inspirée par le télégraphe d’impression.
Breveté en 1876 par Edison, il symbolise parfaitement l’état d’esprit de la fin du 19e siècle, où l’on pense que les gestes du quotidien seront, dans le futur, facilités par les appareils électriques.


Ce stylo révolutionnaire pour l’époque, proposait de dupliquer rapidement des documents écrits à la main.
Relié à une pile, le stylo était composé d’un moteur miniaturisé au bout d’une tige en métal dans laquelle se trouvait une mine fine métallique.
Une fois en fonctionnement, la mine opérait un mouvement de va et vient rapide qui permettait de faire des trous dans le papier suivant le dessin ou le lettrage requis. Ce papier servait alors par la suite de pochoir.
Grâce à une presse, on enduisait le pochoir d’encre pour imprimer le document sur une feuille.
Ingénieux n’est-ce pas ?
Grâce au stylo d’impression autographique, il était possible d’imprimer 6 épreuves à la minute. Et selon le manuel, le moteur rotatif pouvait effectuer 50 ponctions par seconde, soit 3000 par minute !
Selon Edison plus de 5 000 duplications pouvaient être fabriquées à partir d’ un seul pochoir.
Pas mal pour l’époque.

Console d'impression autographique et son stylo inventée par Edison.
Console d’impression autographique et son stylo.

Malgré cela, note cher Edison n’était pas encore tout à fait satisfait de la conception de son stylo électrique car il le modifia à plusieurs reprises.

En 1877, il développe une nouvelle idée et pose un autre brevet sur cet appareil. Ce nouveau stylo est assez différent de la machine rotative d’origine.
La nouveauté, c’est qu’il propose un dispositif à deux bobines électromagnétiques disposées transversalement au tube.
Une languette de métal flexible vibre sur ces bobines et créé le mouvement de va-et-vient de la mine nécessaire pour percer le pochoir.

Brevet-1877- Deuxième version du stylo éléctrique d'Edison
Brevet de la seconde version à deux bobines du stylo électrique d’Edison en 1877.

Malgré ces améliorations, la question du poids de la machine hante encore Edison.
Un an plus tard, il décide de modifier une nouvelle fois le stylo en supprimant la batterie, (qui semblerait énorme aujourd’hui !) et ajoute également un mécanisme à pédale alimenté par le pied de l’utilisateur ; identique à une machine à coudre ou à un antique foret de dentiste.

En plus de cela, le 25 juin 1878, le prolifique Edison dépose également le brevet d’un stylo électrique pneumatique qui utilise la pression de l’air, du gaz ou un liquide pour faire tourner un système de ventilation et entraîner la mine.
Cette nouvelle technologie rendrait selon lui la machine plus légère et plus facile à utiliser que les versions précédentes.

Utilisée un temps par les banques et les maisons de commerce, le stylo électrique reste une machine encombrante et difficile à utiliser pendant une période prolongée.
Elle sera, malheureusement pour Edison ,vite dépassée par le succès de la machine à écrire associée au papier carbone.
Fabriqué en seulement 10 000 exemplaires jusqu’en 1885, « le stylo électrique d’impression autographique » est aujourd’hui un objet rare.
On en recense seulement une vingtaine dans le monde dont deux en Europe.

Les pionniers de la machine à tatouer

Samuel O’Reilly brevète la première machine à tatouer rotative


Quelques années plus tard, Samuel O’Reilly, immigrant Irlandais et tatoueur à New York, passe devant la vitrine d’un magasin de fournitures de bureau sur Bowery Street.
Selon la légende, il aurait aperçu le stylo d’Edison dans la vitrine et serait entré immédiatement dans la boutique pour une démonstration.

Samuel O'Reilly père du premier dermographe électrique
Samuel O’Reilly officiellement père du premier dermographe électrique.

Fort de cette découverte, il vérifia immédiatement auprès de l’office Américaine des Brevets (US Patent Office), et constata que le brevet avait expiré sur la machine d’Edison.
Après quelques modifications mineures, comme l’inclusion d’un réservoir d’encre à la pointe du tube et le déplacement efficace du moteur, il parvint à alléger le poids de la machine et à faire en sorte que la barre d’aiguille puisse désormais accueillir un total de trois aiguilles.
O’Reilly breveta ainsi la première machine à tatouer électrique le 8 décembre 1891.

Brevet Samuel O'Reilly pour la première machine à tatouer éléctrique.
Brevet de la première machine à tatouer électrique déposé par O’Reilly en décembre 1891.

Mais méfiez-vous ! Même si l’histoire insiste sur le fait que O’Reilly se serait largement inspiré du stylo d’Edison, les avis restent partagés…

Le fouloir dentaire de Bonwill

Effectivement, il existe aussi une hypothèse selon laquelle le stylo électrique d’Edison ne fut pas la première source d’inspiration d’O’Reilly pour sa fameuse machine à tatouer.
En effet, il semblerait que O’Reilly ait également pris comme référence un fouloir dentaire (un outil portatif utilisé par les dentistes de l’époque pour enfoncer l’or ou le métal dans les cavités dentaires des patients).

C’est le dentiste américain William Gibson Arlington Bonwill qui est à l’origine du premier outil dentaire électromagnétique de ce type.
Ce fouloir dentaire est équipé de deux bobines positionnées verticalement, en décalage par rapport au cadre.
Il est possible d’ajuster le mouvement et il est également muni d’un bouton marche/arrêt.
Bonwill aurait eu cette idée en observant les bobines électromagnétiques d’une machine de télégraphe en marche.
Le dentiste dépose deux brevets antérieur au stylet d’Edison en 1871 et 1873.

William Gibson Arlington Bonwill inspira peut-être la première machine à tatouer moderne
William Gibson Arlington Bonwill

Pour son invention, Bonwill reçoit la médaille Cresson, la plus haute distinction de l’Institut de science de Franklin. Son modèle de machine est le premier instrument portable à commande électrique. C’est une invention majeur pour l’époque et dans tous les domaines. Bonwill commercialise sa machine entre 1871 et 1880.

Fouloir électromagnétique de dentiste

Fouloir électromagnétique de dentiste.. Hubbard Bros., 1876. Collection de Carmen Nyssen.

Dans une interview de 1878, Bonwill affirme que Thomas Edison se serait largement inspiré du fouloir dentaire pour le développement de son stylo électrique.

Pour confirmer l’hypothèse, en 1898, Samuel O’Reilly lui même, explique dans une interview, qu’il aurait expérimenter les deux inventions avant de créer sa propre version de la machine à tatouer.
En testant les deux machines, il se rend compte qu’elles sont bien trop faibles pour tatouer. Finalement, il crée son propre modèle après plusieurs essais. Il dépose son brevet et finalise sa machine avec un mécanicien habile dénommé John Feggeter Blake, un inventeur, machiniste et illusionniste anglais.

Histoire de la machine à tatouer moderne - Samuel O'Reilly
Samuel O’Reilly en plein travail.

Dans tous les cas, O’Reilly révolutionne la pratique du tatouage.
Là où il fallait des heures d’un piquage laborieux, désormais quelques minutes suffisent. Le succès est immédiat et la recette journalière du tatoueur atteint parfois les 100 dollars ! La formule fait des émules et bientôt nombre de tatoueurs itinérants posent leurs sacs près du port.
La pratique se sédentarise et Chatham Square, où s’était installé O’Reilly, devient peu à peu un haut lieu du tatouage New-Yorkais.

Cliquez ici pour lire la suite de l’Histoire de la machine à tatouer moderne.




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